Il me rappelle la fille que j'étais avant : en gros, j'étais toujours mal à l'aise en société, blessée de paroles, regards, mots que l'on portait sur moi. Avec le recul, il me semble que j'étais surtout fragile, éminemment cassable, susceptible d'être blessée par tout.
J'ai commencé à en avoir assez et comme je suis maladroite, j'ai décidé de faire comme si tout ce que je ressentais m'indifférait. Non, ça n'est pas ça. J'ai décidé de ne jamais montrer ce que je ressentais. De proposer aux gens systématiquement des sourires et une attitude d 'une amabilité impénétrable. Ça n'est pas en famille que j'ai fait cela, mais dans un certain type d'entourage professionnel.
J'ai pris soin d'arriver en marchant d'un bon pas, un sourire aux lèvres, avec l'attitude du bonheur et du dynamisme. J'ai pris soin d'éviter de remarquer les regards appuyés ou fuyants. Je me suis comportée comme si j'étais seule dans un monde merveilleux, traversé ponctuellement de personnes qui n'existaient que le temps de me poser une question ou d'interagir professionnellement avec moi, puis disparaissaient, tandisque je demeurais seule dans mon monde merveilleux. J'ai saupoudré les alentours d'infos relatives à ma vie merveilleuse, mais pas trop. Là, je laisse traîner une photo SFW de fête joyeuse. Ici, j'égare un marque page qui est un gentil dessin d'une petite cousine. Bref, ma vie est aussi délicieuse qu'impénétrable. Telle est l'image que j'ai tenté de donner autour de moi, car les personnes odieuses que l'on peut rencontrer dans la vie ont plus de mal à s'emparer d'une place forte hermétiquement close que d'un lieu où tout le monde entre.
Mais il s'est passé autre chose.
A partir du moment où j'ai eu besoin de me remplir de pensées positives pour exsuder le bonheur par tout mon être, j'ai eu besoin de trouver les sources de ces pensées dans ma vie, dans ma vraie vie, dont je me plaignais tout le temps auparavant. J'ai donc "fait comme si" tout ce que je trouvais pénible dans ma vie ne l'était pas tant que cela, en cherchant à valoriser les côtés positifs de toute ma vie, et en oubliant les négatifs.
Exemple : j'ai été élevée par une personne tyrannique et injuste qui m'a formatée en me diminuant et je lui en veux énormément (pour le dire vite). Mais elle m'a donnée aussi beaucoup d'énergie, une façon systématiquement positive d'envisager les choses 8cette personne envisageait tout ce qui lui arrivait d'une façon positive), et les injustices qu'elle a commise à mon encontre m'ont rendu plus futée, maligne et débrouillarde que l'indulgence dont cette personne a fait preuve envers d'autres. Il est donc possible, dans des rapports sociaux superficiels, de ne pas me lancer dans une longue complainte sur cette personne, mais d'évoquer, sincèrement, quoique sans appuyer trop dessus, tout ce que ladite personne m'a apporté. C'est ce que j'ai donc fait, sans rentrer dans les détails, chaque fois que l'occasion se pr´sentait.
Au fil du temps, je me suis rendue compte que cette personne m'avait vraiment apporté beaucoup. Je pouvais, soit l'envisager du côté de ma rancoeur, ce qui m'est très facile, et alors, je me sens animée de récrimination perpétuelles, et mon moral descend. Ou bien, je pouvais l'envisager sous l'angle de ce qu'elle m'a apporté, et alors, mon moral remonte, je me sens plus forte.
En d'autres termes, je me suis prise à mon petit jeu : si je décide d'envisager ma vie côté douleur, peine et tristesse, je peux sortir tout le matériel et me rendre malheureuse à me souvenir de choses douloureuses. C'est ce que j'ai fait pendant longtemps. Mon caractère me pousse à reprocher aux gens de m'avoir fait des vacheries.
Mais je peux aussi décider de faire table rase de tout cela, de ne pas m'en préoccuper et de ne penser qu'au positif, en faisant volontairement fi du négatif ; je dis bien volontairement. Alors, une nouvelle lumière éclaire ma vie et mes rapports avec els gens : tout ce que m'apportent certaines personnes négatives m'apparait alors. (Note : ces personnes négatives, je fais tout de même tout pour les fuir le plus souvent possibles, hein....)
Ce que je veux dire, c'est que cette attitude, que j'ai eu tout d'abord comme un jeu, pour me gonfler moi même à bloc face à tous ceux que l'on croise dans la vie et qui peuvent nous diminuer, m'a influencé moi même : j'ai pris conscience, par ce biais, que tous ceux à qui j'en voulais de m'avoir fait souffrir m'avait aussi apporté des choses, de la force, de la combativité. A l'inverse, des personnes de mon entourage, de "gentilles" personnes qui m'ont écouté, accueillies, comprises, poupougné, n'ont pas toujours été si positives que cela.
Il me semble en être réduite à aller, sans en avoir l'air, chercher conseil auprès de personnes qui vont me rabaisser de prendre conseil auprès d'elles, mais j'ai envie d'avoir leur avis ; et pour m'en remettre, je vais me faire emberlificoter de douceurs sirupeuses auprès de gentilles idiotes dont les conseils n'ont aucune valeur.
dimanche 28 novembre 2010
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